Dans l’interview qu’il donne au journal Capital d’octobre, Florent Menegaux invoque deux raisons principales au déficit de compétitivité de trois sites français (Cholet, Vannes, Joué-les-Tours): le coût prohibitif de l’énergie et une inflation salariale « colossale » selon ses propres termes.
Sur l’inflation salariale, ce n’est pas ce que montre l’évolution des frais de personnel de la MFPM. Car ils n’ont fait que suivre l’évolution de ceux du Groupe comme le montre le graphique.
Et rapportés au chiffre d’affaires, ils sont même inférieurs à ceux du Groupe.
Ainsi, en 2023, les frais de personnel du Groupe représentaient 26,1% des ventes tandis que les frais de personnel de la MFPM représentaient 25% des ventes réalisées sur la France.
Et sur les 5 dernières années, hormis l’année de la Covid en 2020, les frais de personnel de la MFPM rapportés au chiffre d’affaires étaient inférieurs à ceux du Groupe.
Et quand on regarde dans le détail les montants des frais de personnel de la MFPM, on ne voit pas non plus d’inflation « colossale ». Dans son rapport présenté en CSEC de juillet, le cabinet Secafi faisait un zoom sur les frais de personnel de la MFPM entre 2018 et 2023.
On constate ainsi que les frais de personnel sont assez sensibles aux rémunérations variables (rubrique primes et gratifications) qui elles-même reflètent les résultats du Groupe. On est ainsi passé de 185 M€ en 2020 à 258 M€ en 2021 (+ 73 M€) puis 194 M€ en 2022 (- 64 M€) avant de remonter à 257 M€ en 2023 (+ 63 M€) : de fortes variations donc d’une année sur l’autre, en fonction des résultats du Groupe.
Ainsi, la moitié de l’augmentation des frais de personnel en 2023 par rapport à 2022 est imputable à l’évolution des rémunérations variables, l’autre moitié étant effectivement liée à l’inflation et sa répercussion sur les charges sociales. Cette surcharge liée à l’inflation salariale représente au plus 58 M€ sur un montant total de 1 417 M€, soit 4% d’augmentation : pas franchement « colossal »…
Pour la partie primes et gratifications, il est encore heureux que les salariés – comme les actionnaires – aient été associés aux très bons résultats du Groupe. Il est en effet légitime de récompenser les salariés qui ont largement contribué à ces résultats.
En revanche, la dispersion de ces primes et gratifications pose la question de l’équité: un agent NRI S avec 90% d’atteinte d’objectifs a ainsi touché au titre des bonus Groupe et équipes 689 € quand certains cadres NRI D avec le même pourcentage d’objectifs touchaient dans le même temps plus de 100 000 €. Soit un écart de plus de 100 000 € : COLOSSAL !!!…
Conclusion : que les sites soient en difficulté en raison de taux de charge insuffisants, conséquence de la stratégie valeur et d’écrémage de l’entreprise, est une chose, que leur déficit de compétitivité provienne d’une inflation salariale « colossale » en est vraiment une autre.
Dominique BOURGOIS, délégué syndical, 15 octobre 2024
Et le montant versé aux actionnaires n’est ce pas colossal !!!!en centaines de millions d’euros
[…] Le climat social est devenu pesant. Michelin dit vouloir discuter ; nous voulons être entendus et obtenir des réponses. Cela fait des mois voire des années que les mêmes constats sont établis, que les mêmes questions sont posées. Les résultats de la récente expertise conduites sur trois sites français n’ont fait que confirmer ce qui était déjà connu, à savoir une baisse drastique des volumes, des effectifs et des taux de charge des usines françaises. Au-delà de l’inquiétude de façade de nos dirigeants, aucune réaction concrète, aucune action démontrant une quelconque humanité ou préoccupation de soulager la détresse de beaucoup de nos collègues en usine. Et comme pour justifier des décisions déjà prises, la Direction dénonce une inflation salariale « colossale » selon ses propres termes. Ce n’est pas ce que montre l’évolution des frais de personnel de la MFPM car ils n’ont fait que suivre l’évolution de ceux du Groupe comme le montre notre article https://cfecgcmichelin.org/2024/10/18/inflation-salariale-colossale-se-desole-m-menegaux-notre-decry…😉 […]
Bonjour
excellent article très clair et factuel. Merci pour cette analyse qui met, une fois de plus, en évidence le fort delta entre le discours de l’entreprise et les faits.
Car les « faits » eux et on le sait sont tenaces …!
Respect des faits. Merci pour cet éclairage