Début octobre, face aux baisses des chiffres d’aFctivité, d’emploi et de taux de charge de certaines usines Michelin, une intersyndicale regroupant CFE-CGC, CGT, FO et SUD a lancé un droit d’alerte. Objectif : demander de la visibilité sur la situation afin d’accompagner au mieux les milliers de salariés, laissés dans l’incertitude et la détresse par le mutisme de leur employeur.
Malgré les nombreux appels au dialogue et à la transparence, Michelin a refusé les échanges avec les représentants du personnel. Mais il vient d’être débordé par les médias qui ont annoncé dès dimanche soir des fermetures à Cholet et Vannes. Cette communication a provoqué un sentiment de trahison chez les salariés qui ont appris la fermeture de leurs usines par la TV ou la radio.
Vos élus CFE-CGC dénoncent la décision de fermer les sites de Vannes et de Cholet et les déplorent. La fermeture de ces 2 sites vise à améliorer le taux de charge des autres usines. Elle n’est que la conséquence de la stratégie de valeur du Groupe: des marchés ciblés, avec moins de volumes et plus de marge. C’est la triste conséquence du capitalisme actuel qui est tout sauf « équilibré », contrairement à ce que dit Mr Menegaux dans les journaux. Fermeture de sites et chômage partiel pour les salariés, dividende à la hausse et rachats d’action massifs (500 M€) pour les actionnaires.
Alors que l’instance représentative du CSEC était dans l’attente d’une réponse concrète aux questions soulevées par l’expertise présentée le 9 octobre dernier pour les sites de Vannes, Cholet et Joué-les-Tours, les médias se sont fait écho des déclarations d’un parti politique, en direct, dimanche, à la télévision, annonçant la fermeture de Cholet et de Vannes.
Rappelons qu’une intersyndicale regroupant CFE-CGC, CGT, FO et SUD avait lancé un droit d’alerte depuis plusieurs mois face au marasme des baisses des chiffres d’activité, d’emploi et de taux de charge des usines. C’est aussi et surtout le manque de réponse concrète de l’employeur qui inquiétait, un employeur qui se déclarait préoccupé par la situation mais qui laissait des milliers de salariés dans l’incertitude et la détresse, un employeur qui en parallèle déployait des efforts de communication pour expliquer le bien-fondé de sa nouvelle stratégie (« leader mondial des composites flexibles ») qui, tout en versant des « salaires décents », ne laisserait « personne sur le bord de la route ». Selon toute évidence, il aurait fallu s’habituer au caractère inéluctable des restructurations (« une entreprise est un organisme vivant qui doit s’adapter ») et accepter les impacts collatéraux des profonds changements d’orientations stratégiques.
Au mépris des sollicitations insistantes des représentants du personnel organisés en intersyndicale, le Groupe Michelin, soucieux de garder la main sur son agenda social, a traité des demandes légitimes de la part de salariés maltraités. Il vient donc d’être débordé et sanctionné pour n’avoir pas compris comment le monde fonctionne désormais : les gens s’informent ; les gens prennent leur destin en main ; les gens veulent être écoutés et obtenir des réponses sérieuses. Les gens veulent être respectés.
Le regain de popularité des organisations syndicales, boostées par les mouvements de revendications autour de la réforme des retraites aurait pourtant dû ouvrir les yeux de nos décideurs. Mais la Direction du Groupe, bien mal informée par des représentants du Personnel et des Relations Sociales soucieux de se protéger plutôt que de faire remonter objectivement la réalité du dialogue social, est complètement passée à côté de l’essentiel, aveuglée par ses certitudes et dopée par ses prétentions stratégiques.
A la CFE-CGC nous nous sommes toujours interdits de juger la stratégie du Groupe ; nous avons toujours cherché à la comprendre, à l’anticiper et à en entrevoir les impacts sur les organisations et les conditions de travail.
Aujourd’hui force est de constater que cette stratégie et ses conséquences, doivent être challengées selon les trois axes suivants :
1) Pourquoi la stratégie « valeur » qui consiste à se concentrer sur les segments de pneumatiques à forte valeur ajoutée doit-elle se traduire par une baisse de volumes ? On peut entendre que le mix change pour s’enrichir, mais pas que les volumes baissent. Il ne faudrait lâcher des volumes que lorsqu’on en a gagné de nouveaux, plus lucratifs. La recherche de ces volumes plus lucratifs est une bonne mesure de l’écart de performance de nos produits.
2) En ce qui concerne les « nouveaux relais de croissance », pourquoi aucun de ces nouveaux business n’a rencontré à date le succès ? Cela pose la question de la capacité de vision, de choix, de création, de business développement, du Top Management du Groupe… Ce devrait être pour Florent Ménégaux une source d’inquiétude. A-t-il les bonnes personnes autour de lui au CEG, ou bien est-il suffisamment capable de les écouter ? A moins bien sûr que le « Speak Up » ne soit qu’un leurre pour masquer la réalité d’un « I Care » illusoire…
3) Pourquoi, à date, l’acquisition majeure prévue dans les composites, n’a-t-elle pas été réalisée ? Est-ce un problème de prix, d’entreprises à vendre, de synergie, de validation par le Conseil de Surveillance ? Cette source de chiffre d’affaires indispensable pour compenser la baisse du chiffre pneumatique va commencer par sérieusement faire défaut dans les comptes du Groupe…
Il est très regrettable que nous, CFE-CGC, soyons amenés à poser ces questions, aujourd’hui, au pire moment de ces annonces délétères, précipitées, mal préparées sans aucune concertation préalable avec les représentants des salariés de Michelin France.
On ne pouvait pas attendre pire scénario qui nuit à l’image de l’entreprise et à ses employés par ricochet.